Article 13

Vente immobilière et vices cachés : comment procéder ?

Publié le 7 février 2017

Monsieur et Madame Fontaine achète un immeuble d'habitation en vue de le rénover et de s'y installer. Peu après le début de leurs travaux, ils découvrent d'importants problèmes fongicides et d'humidité.

 

Le couple adresse un e-mail pour lui dénoncer la situation, mais celui-ci ne répond pas. Ils font constater les vices par un huissier de justice puis attendent quatre mois avant d'agir en justice. Les acheteurs seront déboutés en instance puis en appel au motif qu'ils n'ont pas agi endéans le "bref délai" prescrit par l'article 1648 du Code civil.

 

Cette mésaventure nous donne l'occasion de faire le point sur cette notion de "bref délai" et de donner quelques conseils.

 

Pour rappel, l'article 1648 du Code civil précise que " l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur, dans un bref délai, suivant la nature des vices rédhibitoires, et l'usage du lieu où la vente a été faite".

 

Première question : quel est le point de départ de ce "bref délai" ?

 

L’obligation d’agir dans un bref délai en matière de vente tend à assurer le respect des droits de défense de celui contre lequel une action est menée et que l’écoulement du temps peut mettre en péril.

 

Le point de départ du "bref délai" est apprécié souverainement par le juge, mais la majorité de la doctrine est d’avis que le bref délai prend cours à dater de la découverte du vice par l’acquéreur ou à tout le moins à partir du moment où il aurait dû en avoir connaissance (voir notamment B.KOHL et F.ONCIN, « L’exigence du « bref délai » dans l’action en garantie contre les vices cachés », J.T., 2013, p.560).

 

Deuxième question : quelle est la durée du "bref délai" ?

 

Le législateur délègue également au juge le soin de déterminer la durée du bref délai en fonction de la nature du vice.

 

A cet égard, plusieurs critères peuvent entrer en ligne de compte :

 

La nature de la marchandise vendue ;

La nature du vice ;

La qualité des parties.

En clair, plus la marchandise vendue est complexe, plus la nature du vice est difficile à déceler, plus les parties sont dépourvues de connaissances techniques en la matière, plus la durée du "bref délai" sera longue.

 

Troisième question : le "bref délai" peut-il est suspendu ?

 

Le "bref délai" de l'article 1648 du Code civil peut être suspendu si les parties ont entamé des pourparlers sérieux. L'envoi d'un simple mail au vendeur, sans réponse de celui-ci comme en l'espèce, ne suffit pas pour suspendre l'écoulement du bref délai. Il faut qu'intervienne une véritable discussion entre les parties et que celle-ci fasse l'objet d'échanges de courriers.

 

Mais attention ! Les pourparlers ne doivent pas s'éterniser, sans quoi ils n'auront plus d'effet interruptif sur la durée du "bref délai".

 

Quatrième question : que faire si aucun accord ne ressort des pourparlers ?

 

Si les discussions s'enlisent, l'acheteur doit assigner le vendeur en justice (au fond et non pas en référé) afin d'obtenir la désignation d'un expert qui constatera l'étendue des problèmes.

 

Petit récapitulatif chronologique.

 

1° L'acheteur doit vérifier au plus tôt l'état de son bien. Dès qu'il découvre l'existence de vices cachés sérieux, il doit en informer aussitôt le vendeur par un courrier recommandé de mise en demeure (un e-mail est insuffisant) lequel fera preuve de la date d'envoi de la réclamation de l'acheteur.

 

2° Si le vendeur ne répond pas à ce courrier, il faut assigner en justice pour obtenir la désignation d'un expert qui viendra constater la nature des vices décelés et préconisera les mesures à prendre pour y remédier.

 

3° Si le vendeur répond au courrier de mise en demeure et entame des pourparlers pour tenter de solutionner le problème, l'acheteur doit conserver des preuves écrites des discussions (échanges de courriers) afin de les produire en justice le cas échéant.

 

4° Si les négociations s'enlisent et qu'aucune solution satisfaisante ne se dégage, l'acheteur doit assigner le vendeur en justice (cf. 2°).

 

Conseil :

 

Le temps joue contre l'acheteur !

 

Entre l'instant où il découvre l'existence du vice jusqu'alors caché et le moment où il est contraint de saisir la justice, il ne peut s'être écoulé plus de 6 à 8 semaines au maximum. A défaut d'avoir agi endéans ce laps de temps, l'action de l'acheteur risque d'être rejetée pour n'avoir pas été intentée au cours du "bref délai" de l'article 1648 du Code civil.

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